Tous les mois, faire échange de vidéo. S’emparer des images et de la bande son, entrer en dialogue avec, sans nécessairement modifier le montage de la vidéo mais en ajoutant selon ses préférences (voix off, texte lu, improvisé, écrit sur l’image, ajout de sons, de musique), puis envoyer sa propre vidéo à son correspondant pour qu’il s’en empare à son tour. Le premier vendredi du mois, chacun diffuse le mixage/montage qu’il a réalisé sur la vidéo de l’autre et découvre à son tour son montage mixé sur la chaîne YouTube de son invité.
Voici les échanges du mois de décembre 2022 :
Le principe des vases communicants vidéo amplifie ce qui était en jeu initialement sur les blogs qui participaient il y a plusieurs années à cette opération d’échange. Cela dépasse le simple déplacement de lieu d’écriture. C’est un dialogue qui s’instaure entre des images en mouvement et le texte (écrit et/ou lu). Des images auxquelles on ne s’attend pas toujours, mais pour lesquelles il faut trouver les mots. Sans illustrer, sans renforcer ce qui se passe à l’image, mais en créant des correspondances et des écarts subtiles, des liens ténus entre l’image et le texte, jusqu’à se demander qui en est l’auteur, pour tout aussi vite oublier cette question. Car ici l’auteure est plurielle. Et c’est la rencontre de cette diversité qui crée la fascination sans cesse renouvelée de ces vidéo-poèmes.
Échange entre Caroline Diaz et Myriam Oh :
Sur les images au ralenti de Myriam Oh, en trois plans, Caroline Diaz nous raconte son histoire, le surgissement d’un souvenir d’enfance. Les images ne sont pas celles décrites, évoquées dans le texte, mais elles y font tout de même référence, à travers quelques signes, des objets qui révèlent et font apparaître dans leur présence fantomatique, renforcée par le ralenti des plans et la musique au piano de Philippe Clérin, un reflet d’enfance : le chat, les bâtiments d’en face, le carrelage blanc, la rambarde, la peluche déchirée, la photo de Jacques Brel. Le texte creuse l’image pour y trouver sa surface de projection. Ici commence le vertige.
En face
Images : Myriam Oh – Texte : Caroline Diaz
Sous un certain angle tout n’est que caresse. Tout est dit dès les premiers mots de la vidéo, aux premières images. Paysage nocturne dans la lumière lunaire qui apparaît souligné par les branches des arbres. Tout n’est que caresse infinie. Danse de l’ombre, de la lumière. La voix de Myriam Oh accueille le rythme des images, leur surgissement lumineux, harmonieux, et s’accorde aux mouvements chaloupés de la musique. Se laisser dépasser pour rendre à la vie sa fluidité. D’un éclat de rire briser toutes les certitudes. Jeux des lumières, reflets colorés, scintillements dans la nuit. Le jeu des corps qui dansent, se cherchent, dialoguent en musique. Remonter à la surface et briller.
Les cinq sens sont obsolètes
Images : Caroline Diaz – Texte : Myriam Oh
Échange entre Juliette Cortese et Milène Tournier :
La voix est omniprésente dans la plupart des vidéos de littératube. Dans cette vidéo de Juliette Cortese, Milène Tournier se tait. Elle nous raconte une histoire. Celle de Boucle d’or. Une boucle d’or actuelle. Qu’est-ce qu’il y a de plus difficile à filmer, si ce n’est son intérieur ? Chez soi, sa maison, son appartement on le voit tous les jours, à force on n’y prête même plus attention. En faire le tour par l’image, c’est souvent un pis-aller, pas le temps de sortir, il fait froid, il fait nuit très tôt en cette fin d’automne, pourquoi ne pas rester chez soi et filmer tranquillement ce qui nous entoure ? Ce qui peut paraître une solution de facilité n’en est pas une. Bien au contraire. C’est une mise à nue, un geste amical tout en humilité. On ouvre les portes de son intérieur, comme les pages d’un texte à venir. Et le récit s’en empare. Sous la forme d’un conte domestique.
Boucle d’or
Images : Juliette Cortese – Texte : Milène Tournier
On reconnaît tout de suite les images de Milène Tournier. Il y a quelques chose de Jonas Mekas dans ces images tremblotantes, sous-exposées, parfois floues, mais qui parviennent à saisir, dans le mouvement incessant de nos villes, son tumulte et sa noirceur, le signe qui fait sens, l’image qui trouble « au nez du réel », et nous renverse dans la capture de l’insaisissable. « Ce qui nous terrasse. » Tout y fait sens. Et c’est toute la beauté du texte écrit et lu par Juliette Cortese qui parvient à entrer dans ces images et le réseau complexe de leur signification : « On verrait les choses pas pareil, on ferait un crochet par une autre part de nous-mêmes. » Les mots écrits sur les images viennent ponctuer la vibration des images et de la voix : À l’infini pousser la langue.
Palimpseste pour les mortes
Images : Milène Tournier- Texte : Juliette Cortese
Les prochains vases communicants vidéo auront lieu le vendredi 6 janvier 2023. Si vous êtes tentés par l’aventure, faîtes le savoir sur le mur du groupe pour que les autres correspondances vidéos puissent être relayées sur le site Litteratube.
La playlist #vasescommunicants sur la chaîne YouTube permet d’ajouter ces échanges mensuels pour mieux les retrouver et les visionner.